| 14.01.11 | 14h23 • Mis à jour le 14.01.11 | 14h23 Un "accord historique", se félicite Jean-Paul Huchon. Une "capitulation", accuse Jean-Vincent Placé, chargé des relations extérieures d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV). Après trois ans de bataille entre le gouvernement et la région Ile-de-France, le projet du Grand Paris, auquel Nicolas Sarkozy attache "une importance particulière", a, cette fois, fait voler en éclats la majorité de gauche de l'Ile-de-France. Un plan d'action commun Etat-région devait être présenté en conseil des ministres, mercredi 12 janvier, par Maurice Leroy, ministre de la ville et du Grand Paris. Il prévoyait près de 35 milliards d'euros d'investissements à l'horizon 2025 pour réaliser, notamment, une rocade de métro automatique autour de Paris (23 milliards d'euros). M. Huchon, président PS de la région, avait donné son accord de principe, le 5 janvier, lors d'un dîner avec M. Leroy. "C'est un projet colossal, la plus grande oeuvre de mon mandat", se félicitait-il, le 12 janvier, en estimant avoir obtenu d'"énormes" avancées de la part de la part de l'Etat. Le gouvernement s'est engagé à verser plus de 3 milliards d'euros sur les quinze prochaines années pour le plan régional de modernisation du réseau de transport existant (11,9 milliards), soit près de deux fois plus que ce que la région finance aujourd'hui. A la demande de sa majorité, M. Huchon a pourtant dû faire machine arrière. Il a demandé au gouvernement "la poursuite des négociations" mettant en avant plusieurs points de désaccord. La communication de M. Leroy en conseil des ministres a été annulée à la dernière minute. La volte-face de M. Huchon s'est jouée, la veille, lors de la réunion de l'exécutif régional. Le patron de la région a distribué, ce jour-là, aux principaux représentants de sa majorité, un document de cinq pages que Le Monde s'est procuré intitulé "Une vision partagée de l'Etat et de la région sur les transports publics du Grand Paris". Rédigé par le cabinet de M. Leroy après discussions avec M. Huchon, il a été jugé "inacceptable" par M. Placé, vice-président (EELV) des transports à la région. "M. Huchon nous a expliqué pendant des mois que la loi sur le Grand Paris portait atteinte aux pouvoirs de la région et il est prêt à tout avaler aujourd'hui", confie M. Placé au Monde. Candidat aux sénatoriales dans l'Essonne, l'élu écologiste s'insurge contre le projet de métro automatique entre Orly et Saclay, ville de son département. Présidente du groupe EELV à la région, Cécile Duflot déplore avoir été tenue à l'écart des négociations entre MM. Huchon et Leroy. Les socialistes ont aussi plaidé pour que l'accord soit "retravaillé". "Il faut qu'on aille à un bon accord mais sans se mettre la pression sur la date", fait valoir Guillaume Balas, président du groupe PS à la région. Première vice-présidente (PS) de la région, Marie-Pierre de la Gontrie envisage pour que la région se donne jusqu'en avril s'il le faut avant de signer avec l'Etat. Président du groupe Front de gauche et communiste, Gabriel Massou souhaite le reporter à après les cantonales. M. Huchon comprend qu'il n'a pas de majorité à gauche s'il soumet en l'état le texte de l'accord au vote de son assemblée. "C'est la première crise grave au sein de la majorité", reconnaît un pilier socialiste de l'exécutif régional. "C'est assez incompréhensible la façon dont Jean-Paul (Huchon) a négocié en chambre sans nous associer", remarque un autre élu PS. Sous couvert d'anonymat, des élus de gauche évoquent les embarras judiciaires de M. Huchon pour tenter d'expliquer sa volonté "d'aller à tout prix à l'accord". Le 24 janvier, le Conseil d'Etat se réunira pour statuer sur le sort du patron de la région. M. Huchon est menacé de voir son élection de mars 2010 invalidée par les juges au motif qu'il aurait omis d'intégrer dans ses dépenses de campagne une opération d'affichage publicitaire sur l'action de la région pour les transports diffusée à l'automne 2009. La haute juridiction pourrait soit rendre sa décision, soit transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité posée par les avocats de M. Huchon, qui contestent notamment l'automaticité de l'inéligibilité. Dans cette seconde hypothèse, le président de la région sera fixé sur son avenir après les cantonales. "Si les juges veulent me couper la tête, ils le feront quoi que je fasse", s'indigne M. Huchon. M. Leroy a prévu une communication en conseil des ministres mercredi 19 janvier. "Avec Jean-Paul Huchon, l'accord est fait. Il existe", répète le ministre. Reste à convaincre la majorité régionale. Béatrice Jérôme Article paru dans l'édition du 15.01.11

A Saclay, le métro de la discorde

| 14.01.11 | 14h23

Jean-Paul Huchon enrage. L'"accord historique sur le Grand Paris" que le patron PS de la région Ile-de-France rêvait de passer avec le gouvernement avant la fin du mois a buté sur un mot : "métro". Vice-président aux transports (Europe Ecologie-Les Verts) à la région Ile-de-France, Jean-Vincent Placé ne veut pas d'un "métro automatique" entre Orly (Val-de-Marne) et Saclay (Essonne). Candidat aux sénatoriales dans ce département, il en fait un argument de sa campagne. Les écologistes se sont toujours opposés au "bétonnage" du plateau de Saclay, grand territoire agricole avec l'accord tacite d'une partie de la droite locale qui tient à protéger son cadre de vie. Or un métro, s'il rend le territoire plus accessible, attire plus d'entreprises et de logements. C'est justement le grand pari de Nicolas Sarkozy : faciliter l'accès des chercheurs, des salariés et des étudiants à Saclay pour que ce site, qui abrite nombre de grandes écoles, de laboratoires de recherche, devienne une Silicon Valley à la française. "Qui peut imaginer attirer ici de grandes multinationales sans leur garantir des liaisons rapides, fiables et permanentes avec tous les grands centres de décisions français, européens et mondiaux ? Je ne céderai pas", avait redit M. Sarkozy, en visite à Saclay, le 24 septembre 2010. Ministre de la recherche, élue des Yvelines, Valérie Pécresse défend aussi le projet. Christian Blanc, ex-secrétaire d'Etat au développement de la région capitale, avait prévu un métro automatique passant sous le plateau pour relier Saclay à Orly via Massy (Essonne). La région, en charge des transports en Ile-de-France, n'a en revanche jamais proposé de métro pour desservir Saclay. Jusqu'à ce que M. Huchon arrête, le 5 janvier, avec le ministre de la ville Maurice Leroy, un plan de transports du Grand Paris dans lequel figure un "automatique" entre Orly et Saint-Quentin-en-Yvelines (Yvelines). Seules concessions par rapport au projet Blanc : le métro, prévu en 2020, sera aérien. Il aura peu de wagons et comptera davantage de rames qu'en 2025. Même "léger", un "métro" n'est pas envisageable pour M. Placé. François Lamy, président de la communauté d'agglomération du plateau de Saclay, et no 2 du PS, n'y est pas non plus favorable. Il craint que le métro n'accapare les crédits pour achever le bus en site propre que la région tente de réaliser entre Orly et Saclay. "Saclay doit être desservi par un métro automatique", a réaffirmé M. Leroy, le 13 janvier. Claude Bartolone prévient : "On ne peut pas aller à un accord avec le gouvernement sur le Grand Paris sans les Verts avant les cantonales." Le président (PS) de la Seine-Saint-Denis promet d'oeuvrer pour sortir du blocage. Béatrice Jérôme