Où en est le Grand Paris version Hollande ? LE MONDE | 04.06.2012 Par Béatrice Jérôme

"Je prends un engagement, celui de créer les conditions nécessaires à l'émergence d'une métropole parisienne capable d'affronter, à l'échelle pertinente, tous les défis qui se présentent à elle", a lancé François Hollande, reçu par Bertrand Delanoë à l'Hôtel de Ville, le 15 mai. Trois ans après le discours de Nicolas Sarkozy, le 29 avril 2009, à la Cité de l'architecture et du patrimoine, son successeur à l'Elysée a repris le mistigri du Grand Paris. Désormais, la ministre de l'égalité des territoires, Cécile Duflot, est chargée de réaliser ce projet qui a donné lieu à une loi en juin 2010 et à un accord entre l'Etat et la région Ile-de-France pour la mise en oeuvre d'un plan de transport. Celui-ci prévoit un métro en rocade autour de Paris. Jusqu'ici, les écologistes se sont démarqués des positions du PS, principalement en matière de transports. "Il y a des acquis intangibles sur lesquels toute remise en arrière serait des combats d'arrière-garde", prévient Pierre Mansat, adjoint de Bertrand Delanoë chargé du dossier. "Je souhaite remettre le Grand Paris sur les bons rails en faisant le point avec tous les acteurs sur ce qui fait consensus", a déclaré au Monde la patronne d'EELV, soucieuse de faire taire les critiques avant même d'avoir écrit sa feuille de route. Si, depuis trois ans, une lourde machinerie avec des nouveaux outils s'est mise en marche, associant tant bien que mal l'Etat et les élus, pour les habitants, le Grand Paris reste encore un mystère. Trois ans après, où en est-on ? • Transports : un projet ficelé, des milliards manquants Chargée de réaliser un métro circulaire de 144 km autour de la capitale, la Société du Grand Paris (SGP), aux mains de l'Etat, prévoit un lancement des premiers travaux fin 2013. "Les études et les enquêtes sur les six tronçons du futur réseau sont prévues selon un calendrier qui permettrait théoriquement de les lancer presque simultanément", affirme Etienne Guyot, président du directoire de la SGP. L'accord Etat-Région prévoit un effort financier sans précédent de rénovation et de développement du réseau de métro et de RER existant. La facture totale a été estimée par l'Etat à 35 milliards d'euros. "Il est clair qu'il manque aujourd'hui quelques milliards", reconnaît M. Mansat. • Logement : une ambition, beaucoup de flou Nicolas Sarkozy avait fixé pour objectif de construire 70 000 logements par an contre à peine 40 000 aujourd'hui, à l'échelle de la région. Pour y parvenir, la loi de 2010 a renforcé les pouvoirs du préfet de la région. Dix-neuf territoires, qui couvrent une centaine de communes, doivent faire l'objet de contrats de développement territoriaux (CDT) entre la préfecture et les élus. Mais, à ce jour, aucun bilan chiffré du nombre de logements crées par les CDT n'a été rendu public. • Gouvernance : une idée relancée, des dissensions Reste le débat sur la gouvernance, que M. Sarkozy avait évacué de son projet, mais à laquelle le PS compte désormais s'attaquer. Lors de sa venue à l'hôtel de ville de Paris, François Hollande a repris une proposition de Bertrand Delanoë de créer une "confédération métropolitaine qui disposera de pouvoirs réels, notamment en matière de logement". Pour la forger, a expliqué M. Hollande, il conviendrait de "s'appuyer sur Paris-Métropole", le syndicat d'élus qui regroupe 200 collectivités de l'aire urbaine parisienne. Mais ce scénario est considéré comme trop "minimaliste" par d'autres grands élus. Le projet de "Livre vert de la gouvernance" établi par Paris-Métropole montre que les idées pour mutualiser les pouvoirs et les richesses en Ile-de-France sont loin d'être convergentes au sein des élus PS. Le président PS de la Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone, y préconise "la fusion des départements de Paris et de la petite couronne et la création" d'une communauté urbaine couvrant le coeur de l'agglomération, "avec des compétences en matière d'habitat et de développement". "Ce que propose Bartolone est irréaliste, estime M. Mansat. Cela aboutirait à créer un monstre bureaucratique de 7 millions d'habitants." Un seul point fait consensus à ce stade entre les élus de gauche : l'idée de créer une Autorité métropolitaine du logement (AML) qui distribuerait les aides financières aux communes - y compris celle de l'Etat - et aurait les moyens coercitifs de les encourager à bâtir. Cette idée pourrait faire l'objet d'une proposition de loi portée au Parlement par la gauche francilienne à l'automne. Lire aussi : Drôle de guerre avant la bataille pour la mairie de Paris Béatrice Jérôme