Séance des 28 et 29 juin 2012 Intervention sur l’Autorité organisatrice du logement François Labroille

Monsieur le président, Madame la vice-présidente, Cher-e-s collègues,

Trop souvent, les débats sur la gouvernance du logement prennent un aspect bien trop institutionnel ou technocratique. Permettez-moi donc de repartir de quelques uns des grands enjeux comment l'ont fait Emmanuel Cosse, Jean-Luc Laurent, et l'excellent étude de l'IAU dont je veux saluer les auteurs Christine Corbillé et Hélène Joinet présentes parmi nous cet après-midi.

L’Île-de-France connaît une crise du logement majeure. Cette crise, c’est d’abord et avant tout celle de la construction. C’est aussi celle du niveau des prix du foncier et des loyers, dopés par la spéculation. C’est enfin une crise marquée par des inégalités territoriales immenses, par la spécialisation des territoires, l’éloignement de l’emploi et de l’habitat.

Cette crise est concrète. Elle se mesure : plus de 400 000 demandeurs de logement en Île-de-France, plus de 4 000 recours par au titre du DALO par mois en Île-de-France, dont très peu suivis d’effets, 46% des jeunes franciliens contraints de vivre chez leurs parents, avec des conséquences pour leur réussite scolaire et professionnelle. Cette crise n'est pas un phénomène sans cause; elle est la conséquence directe des politiques de marchandisation. C'est donc  à l'aune de ces enjeux que la création d'une autorité organisatrice du logement nous semble être une des réponses pertinentes.

Pertinente, parce que force est de constater que l’absence d’articulation des politiques du logement en Île-de-France contribue à creuser les inégalités territoriales. La somme des objectifs de production de logement inscrits par les territoires est en effet très en deça de l’objectif de 70 000 nouveaux logements par an que nous inscrivons dans le SDRIF. Le parc social est plus que jamais inégalement réparti, puisque 90% des logements sociaux sont concentrés dans 15% des communes. Le déficit de construction de logements dans les zones d’emploi continue à alimenter la spécialisation des territoires.

L’élaboration d’un programme régional de l’habitat, la définition d’objectifs partagés par territoire, la répartition des aides financières aux collectivités et aux opérateurs en fonction de ces objectifs et de critères de solidarité territoriale, sont des enjeux décisifs qu’une Autorité organisatrice du logement doit permettre de traiter. Le périmètre régional nous semble pour ce faire le plus pertinent ; car si les enjeux du logement dans la zone dense sont particulièrement exacerbés, il y a une très forte interaction avec ceux du périurbain et du rural, où la gentrification alimente un étalement urbain incontrôlé. Penser la métropole, c’est bien justement penser ces interactions.

La question de la gouvernance ne doit en aucun cas se substituer à la question des moyens. Cette question doit être posée comme première : nous ne résoudrons pas la crise du logement sans un investissement public massif pour construire du logement, et notamment du logement social.

Cette communication est une première étape positive. Bien des questions restent cependant à traiter.

Je pense à celui de la composition de l’Autorité organisatrice du logement et de sa gouvernance. De sa composition, de son mode de fonctionnement, de sa capacité à dialoguer avec l’ensemble des territoires dépendra sa légitimité, et donc sa capacité à agir.

Je pense à celui, enfin, du lien avec l’État et du pouvoir de contrainte de cette future Autorité. Le renforcement de la loi SRU devra aussi passer par la possibilité de se substituer aux maires qui, aujourd’hui, refusent délibérément son application.

Beaucoup de travail reste donc à faire. Ce travail ne doit pas être celui d’un petit groupe, encore moins celui de la seule institution régionale. La démarche partenariale qui a été engagée doit se poursuivre et s’ouvrir à l’ensemble des territoires, et plus loin, aux populations et à l’ensemble des acteurs du logement en Île-de-France. Vous pouvez compter sur notre participation, exigeante et constructive.