Monsieur le président, Chères et chers collègues,

Nous prenons évidemment très au sérieux votre communication dans un moment où les incertitudes sont grandes sur les évolutions institutionnelles mais où les sources d’inquiétude le sont plus encore. Nous ne détachons pas ces questions du gouvernement de la métropole et de la Région d’un contexte général où les risques d’enlisement de notre pays dans la crise et le chômage, dans la désespérance, dans la défiance à l’égard de la sphère politique pour des millions de salariés.et de jeunes sont bien là. C’est donc à l’aune des indispensables réponses aux grandes préoccupations de nos concitoyens, d’un nouveau souffle démocratique pour redonner espoir dans une vision mobilisatrice de l’avenir que nous nous situons. __ Derrière les questions institutionnelles nous savons qu’affleurent fondamentalement les projets que les uns et les autres portent.__ Ces dernières années suffisent à remettre en mémoire les affrontements que nous avons vécus avec la droite dans cette région sous la présidence de N. Sarkozy. Le vrai sujet que toutes les formations politiques ont à traiter est la conception de la métropole/ville monde, de son articulation avec le reste du territoire. et donc de dire quelles institutions l’on veut mais pour quel projet ?

I – Cette question du projet prime pour nous sur toutes les autres. Notre approche a toujours été de relever le défi d’une autre métropole que celle du capitalisme mondialisé, non ségrégative, celui d’un grand Paris et d’une région populaires, alliant modernité et solidarité, avec l’effervescence des nouveaux projets, de nouveaux quartiers, de nouvelles mobilités, en se saisissant aussi de l’impératif écologique que de l’urgence à renverser le creusement des inégalités sociales. Les travaux du SDRIF ont au moins en partie cette empreinte. Les projets que développent les collectivités aussi, souvent. Mais l’on sait que l’affrontement est vif, avec la droite sur la vision de l’avenir…et les nouveaux équilibres politiques issus des municipales nous rassurent d’autant moins à cet égard que le courant.de la droite revancharde semble vouloir s’imposer comme on l’ a vu cette semaine à Paris Métropole.

II - Alors oui, parce que nous avons une telle ambition, nous ne sommes pas indifférents aux évolutions institutionnelles. Nous ne sommes pas des partisans de l'immobilisme. Le débat n'est pas entre le statu quo et le changement mais bien sur le type de changement à réaliser. Nous avons toujours mis en avant deux repères : renforcer l'efficacité des politiques publiques et approfondir la démocratie.

C'est à dire d'abord rechercher les réponses les plus pertinentes pour résoudre les problèmes des franciliens. Et à cet égard, nous n'opposons pas la fonction irremplaçable de la Région comme garante de cohérence et garante d'une vision stratégique de l'aménagement – en ce sens nous rejoignons l'une des idées force de votre communication - et la fonction de autres niveaux qu'il s'agisse de l'échelle métropolitaine, de la ville de Paris, des départements, des intercommunalités et communes mais aussi de L’Etat. Notre second repère est celui de la démocratie. Ce qui n'a rien à voir avec le scénario de la métropole intégrée et sa démarche typiquement descendante de la loi MAPTAM. Nous n'opposons pas la commune, les interco et la métropole. Nous sommes attentifs à la démarche ascendante qui s'est construite au sein de Paris Métropole, de coopérative de villes pour renouveler le concept d'intercommunalité et d'un modèle coopératif ou confédéral pour penser l'échelle métropolitaine. Nous pensons que cet échelon métropolitain devrait inventer de nouveaux espaces de dialogue et de coopération, capables de mettre en débat les grands choix à opérer non seulement au travers des élus, mais aussi avec une meilleure représentation des citoyens et des acteurs sociaux. L'un des enjeux de la récriture de l'article 12 de la loi et de la mission de préfiguration sera de savoir quel scénario l'emportera.

III - Mais les évolutions globales qui se dessinent ne vont pas dans le bon sens, ni dans leurs méthodes ni dans leur contenu.

Déjà, la façon de procéder sur la métropole du grand, Paris était inacceptable quand quelques députés ont imposé voici un an avec le gouvernement ce schéma de la métropole intégrée dont on se demande qui le défend encore. Avec la réorganisation territoriale annoncée par le président de la République, pour reprendre la formulation du géographe Michel Lussaut dans Libération du 16 juin, « nous en avons été réduits à attendre la parole et le dessin présidentiel diffusés par voie de presse »   le 3 juin là où – je cite - « envisager une vaste consultation, organiser un réel travail collectif fertile, fût-il ouvert aux contradictions et aux désaccords » était possible.

Méthode et fond se rejoignent comme souvent. Le projet présenté semble plus guider par l''obsession de la réduction de la dépense publique que par une vision de l'aménagement du territoire, par la suppression de la clause de compétence générale pourtant rétablie il y a quelques mois, par des découpages hasardeux, faits sur un coin de table et plus politiciens que prospectifs, par une suppression programmée des conseils généraux sans aucune étude d'impact sérieuse.

Alors, nous voulons le dire avec un peu de solennité. Ce bouleversement institutionnel conçu dans la précipitation et dans l’improvisation touche le cœur même de la République. Nous savons bien que toute organisation territoriale est datée historiquement. Mais nous touchons ici aux fondements même de l’organisation républicaine héritée de la Révolution française. La modernité ne saurait se construire sur un repli général de l'action publique en sacrifiant les politiques de proximité et de solidarité sur l’autel de l’austérité budgétaire,

IV - Pour nous – je l'ai déjà indiqué – les réorganisations institutionnelles n'ont de sens que si elles permettent des politiques publiques plus efficaces et un approfondissement de la démocratie.

Cela implique pour l'Ile de France une réorientation profonde de la construction de la métropole du grand Paris, de faire de la question du projet métropolitain et régional la question clé avec les acquis du SDRIF et tout le défi de sa mise en œuvre et de sa déclinaison en relation avec les dynamiques territoriales, de s'attaquer à la question de redistribution de la richesse, de donner la priorité absolue à la lutte contre les inégalités et à la complémentarité des territoires.

Mais pour conclure je veux affirmer qu'un tel chantier ne pourra pas réellement se conduire sans débat approfondi et populaire parce que les citoyens sont in fine les seuls vrais acteurs légitimes de ces transformations. Il devrait donc s'appuyer sur tout un processus délibératif et sur une consultation y compris par référendum sur les évolutions institutionnelles retenues.

Monsieur le Président, cette démarche d'ensemble rejoint parfois certaines des préoccupations exprimées par votre communication. Parfois elle s'en écarte franchement quand elle suggère une approbation de la réforme territoriale engagée par le gouvernement. Nous sommes partisans du débat pour dégager les éléments d'une interpellation commune du gouvernement quand cela est possible comme nous avons déjà été capables de le faire à plusieurs reprises sur les dotations de l’Etat et la nécessité d'une réforme fiscale assurant des ressources perennes et dynamiques aux collectivités .Nous sommes partisans du débat aussi pour identifier aussi nos différences voire nos divergences d’approche. Mais soyez persuadé de notre détermination en toutes circonstances à contribuer à un projet solidaire et démocratique pour l'île de France. Je vous remercie.