C’est une proposition qui avait marqué la campagne des élections régionales, il y a un an et demi : celle d’en finir avec la tarification par zone des transports franciliens pour créer un pass Navigo unique dans toute la région, au tarif des zones 1-2.

C’est une mesure élémentaire de justice sociale et territoriale que proposait Pierre Laurent, tête de liste du Front de gauche. Il s’agit de mettre enfin un terme à cette triple peine qui pèse sur la vie quotidienne de millions de salarié-e-s de notre région : plus on habite loin du centre, plus on s’épuise dans les transports, et plus on paie cher.

Cette proposition nous tient à cœur. Car à travers elle, nous affirmons un message fort : qu’on habite à Paris ou dans le Val-d’Oise, au terminus du RER D ou au cœur de la métropole, les Franciliennes et les Franciliens ont toutes et tous le droit à la mobilité. Une seule région, un seul tarif, une seule zone : le droit à la mobilité, c’est aussi le droit de s’approprier la métropole, d’en découvrir toute la diversité.

Cet engagement n’est pour nous pas nouveau : dès 2007, c’est le groupe communiste, Alternative citoyenne et Républicain au Conseil régional d’Île-de-France qui avait obtenu la suppression des zones 7 et 8. Dès 2010, fraichement élus, nous réitérions en obtenant la suppression de la zone 6.

Une zone unique en Île-de-France, c’est possible, et nous en faisons la preuve. Nous proposons, en même temps que la zone unique, d’harmoniser partout en Île-de-France la contribution des entreprises, le versement transport. Cela rapporterait 800 millions d’euros : suffisant pour permettre à la fois la zone unique et de dégager des marges pour améliorer la qualité des transports publics.

Soucieuse de protéger les intérêts de son clan, la droite au pouvoir refuse obstinément de toucher au versement transport. On nous assène l’habituelle complainte des entreprises étranglées : on oublie simplement que quand les salarié-e-s galèrent dans les transports, c’est l’économie qui trinque. Les entreprises sont les premières bénéficiaires de l’amélioration des transports : qu’elles y contribuent est légitime et nécessaire.

Ces dernières années, des élu-e-s d’autres sensibilités nous ont rejoint dans ce combat pour la zone unique. Tant mieux. Mais il est pour nous inacceptable que notre proposition soit dévoyée sur deux questions : le niveau tarifaire de la zone unique et le financement de cette mesure.

Toute explosion des tarifs serait pour nous intolérable. Qu’on regarde les chiffres : une zone unique à 78 € par exemple, pour les habitants de Paris et de la petite couronne, notamment les catégories populaires, ce serait une augmentation de 27% ! Pire encore, pour les usagers des zones 4-5, la hausse serait de 42%.

Injuste, une telle décision serait aussi incompréhensible : ainsi, à six mois d’échéances électorales majeures, on renoncerait d’emblée à mener la bataille sur la contribution des entreprises ; on acterait qu’une victoire de la gauche n’y saurait rien changer. Ce serait désespérer de la possibilité d’une politique alternative dans ce pays !

Notre proposition d’une zone unique au tarif de la zone 1-2 n’est pas dissociable de son financement. En la faisant reposer sur une explosion de la contribution des usagers ou des collectivités, et donc des contribuables, comme le propose le rapport Carrez, on viderait cette mesure de justice sociale de son contenu et de sa portée.

Pour notre part, nous ne nous résignons pas : plus que jamais, nous portons l’urgence et la pertinence d’une tarification unique en Île-de-France, au prix de la zone 1-2. Pour cela, la gauche doit engager la bataille pour mettre les immenses richesses qui existent dans notre pays et dans notre Région au service du droit à la mobilité de toutes et tous.

C’est en ce sens que les sénatrices et sénateurs du groupe Communiste, républicain et citoyen déposeront des amendements à la loi de finances proposant de porter le taux du versement transport à 2,6% partout en Île-de-France.

Monsieur le Président, vous vous êtes engagé, lors du second tour des élections régionales de 2010, en faveur d’une tarification unique du pass Navigo en Île-de-France. Aujourd’hui, quelles pistes envisagez-vous quant au montant et au financement de cette tarification unique ?

Réponse de JP Huchon

Vous m’interrogez sur la mise en œuvre d’une tarification unique du Pass Navigo.




La tarification unique est à la fois une conviction et un engagement pris devant les Franciliens. Mais sa mise en œuvre – et plus globalement, la réforme de notre système de tarification – pose une question de responsabilité, alors même que la crise économique et les mesures de rigueur imposées par le Gouvernement pèsent sur nos concitoyens et sur les collectivités locales.




L'amélioration du réseau existant et le développement de l'offre de transport sont les priorités des usagers des transports en commun, des collectivités franciliennes et des acteurs économiques en Ile-de-France.




Les réponses aux nouveaux besoins de déplacements des Franciliens privilégient aujourd’hui les dessertes de rocade aux liaisons Paris/ banlieue. Mis en place en 1975, le système de tarification concentrique trouve donc ses limites : c’est un nouveau système de tarification qu’il faut inventer pour répondre aux enjeux de la transformation de l’offre de transports en Ile-de-France ; et la tarification unique prend tout son sens dans ce cadre.




Aussi, la question n’est plus « pour ou contre la tarification unique ? ». Mais « la comment y parvenir ? ».




Nous y travaillons en ce moment même au sein du STIF – c’est l’enceinte légitime pour traiter de cette question. C’est un débat certes difficile mais constructif – et je suis confiant dans la capacité des élus de la majorité régionale et des présidents de conseils généraux à engager la mise en œuvre de la tarification unique en Ile-de-France.

Pour ma part, j’ai fait valoir 3 conditions essentielles :

− La priorité des Franciliens, c’est l’offre et la qualité de service. On ne peut accepter un nouveau système de tarification s’il compromet financièrement les efforts collectifs qu’il nous faut allouer chaque année à l’offre de transport et à la qualité de service ;

− On ne peut faire peser le coût de la réforme sur les seuls usagers ; ils sont pris à la gorge par les effets de la crise économique et les choix inconséquents du Gouvernement– la hausse de la TVA sur les titres de transport, qui va coûter 50 M€ au STIF, en est le parfait exemple. Sur ce point, je ne peux que rejoindre les propositions du Front de gauche : si les entreprises bénéficient des effets de la tarification unique, il me semble légitime qu’elles contribuent davantage ; et l’homogénéisation du versement transport est évidemment un levier important.

− Enfin, on ne peut pas solliciter les collectivités locales au-delà du raisonnable : les départements et les collectivités connaissent des situations budgétaires très difficiles et il serait inacceptable de faire payer une telle mesure par le contribuable.

Aussi nous faut-il étudier toutes les pistes, notamment la mise en place d’une véritable réforme de la tarification en Ile-de-France, plus moderne et plus juste, dans un calendrier élargi.

Pour conclure, et pour répondre au groupe Majorité Présidentielle, je crois pouvoir dire qu’une bonne négociation n’implique ni de trahir ses engagements ni de capituler devant quiconque : je m’étais engagé à ce que nous mettions en œuvre rapidement le plan de mobilisation pour les transports ; nous avons signé, avec l’appui de l’ensemble de cette assemblée, une convention particulière avec l’Etat pour près de 3 Mds€ d’ici 2013 ; et nous prévoyons en 2012 de faire des efforts qui s’imposent sur le budget des transports.

C’est bien là la preuve que lorsque je prends un engagement, je m’y tiens.