Budget 2012 : priorité aux lycées publics
Le débat sur le financement des lycées privés sous contrat est un enjeu important. Les contraintes de la loi et le contexte actuel très particulier avec les risques de recours contentieux obligent à détailler un certain nombre de données. Ce détour est nécessaire pour expliciter notre stratégie de priorité en faveur des lycées publics dans la politique régionale mais aussi avec l'indispensable changement de loi.
Le groupe du FdG défend la priorité en direction des lycées publics. Il cherche à contribuer sur cette base à la politique régionale, sachant que la VP chargée des lycées et des politiques éducatives, Henriette Zoughebi, est issue de nos rangs.
Pour le budget 2011, nous avions fortement appuyé le choix d'un budget qui a diminué de moitié l'investissement pour le privé en le limitant aux travaux des mise en sécurité et en refusant le financement de toute création de place nouvelle. Simultanément, les dépenses en faveur des lycées publics avaient été significativement augmentées.
Pour le budget 2012, les orientations ont été établies dans un contexte tout à fait particulier prenant en compte les négociations en cours avec les représentants des établissements privés sous contrat avec l'Etat.
Les mécanismes de financement de l'enseignement privé et les risques de contentieux
Toutes les collectivités territoriales, départements et Régions, sont en effet confrontées à la demande de revalorisation du forfait d'externat (subvention de fonctionnement des établissements privés – charges matérielles et de personnels TOS dépenses obligatoires définies à l'article L 442 – 9 du code de l'éducation). Le mode de calcul du forfait est hérité de la pratique de l'Etat avant décentralisation et les représentants de l'enseignement privé mettent en avant qu'il ne respecte pas la législation. La rédaction de la loi et son interprétation par les tribunaux ne sont pas en effet très favorables aux collectivité s territoriales. L'enseignement privé gagne la plupart de ses recours contentieux. C'est pourquoi la Région Ile de Franc est entrée dans des négociations avec le CREC (comité régional de l'enseignement catholique ) concernant sa demande de revalorisation du forfait d'externat mais prenant aussi en compte les dépenses non obligatoires financées aujourd'hui par la Région (Investissement, gratuité des manuels, aide aux familles sous condition de ressources). La demande initiale de l'enseignement privé d'IdF était de 80 millions d'euros par an (au lieu de 42 actuellement pour le forfait d'externat , 8 en Investissement et 4 pour la gratuité des manuels). Une lecture stricte d e l'article du code de l'article a conduit la Réghion IdF à faire la proposition de 61 millions d'euros. Ce montant correspond au respect de la loi et prémunirait la Région contre un recours contentieux. Dans des négociations analogues, certaines Régions ont fait le choix d'équilibrer l'effort entre augmentation du forfait et aide à l'Investissement pour permettre une augmentation minorée du forfait d'externat. En IdF, cette proposition de 61 millions d'euros n'a pas conduit à un accord avec le CREP qui a formulé des exigences en investissement que la Région n'a pas acceptées. Les négociations doivent donc reprendre en 2012. Dans ce contexte, le choix de l'assemblée a été de provisionner les lignes budgétaires à hauteur de 61 millions pour le forfait d'externat, de maintenir l'investissement à la même hauteur qu'en 2011 pour préserver un cadre de négociations. A ce stade, rien n'est donc complètement arrêté sure ce que sera au final la contribution financière de la Région à l'enseignement privé.
Quel positionnement politique?
Toute la difficulté tient à la contradiction entre un affichage immédiat de principe en apparence irréprochable mais à l'arrivée potentiellement très favorable au privé et très couteux pour les fonds publics.
Le FdG et A a opté pour ce premier scénario. Il a proposé un amendement pour supprimer a priori les dépenses d'investissement et un amendement pour ramener la ligne forfait d'externat à l'existant. Il a donc choisi d'ignorer le risque de contentieux. Si on les avait suivi sur cette position qui peut apparaitre vertueuse sur les principes, on aurait fait prendre le risque à la collectivité d'une condamnation en contentieux conduisant à l'arrivée à une subvention bien supérieure à l'augmentation proposée dans le budget 2012.
Le FdG a opté pour un autre scénario tout en mettant simultanément en avant la nécessité de changer la loi et donc le code de l'Education. Il s'agit non seulement d'être pragmatique pour limiter un surcôut juridiquement inévitable en faveur du privé qui pourrait être de l'ordre de l'ordre de 20 millions d'euros par an (sans compter les effets de la jurisprudence pour les autres Régions et départements) mais aussi de sortir à terme d'un mécanisme de calcul pervers pour les fonds public. Il s'agit en effet d'aller au minimum dans le sens d'une définition plus restrictive du forfait d'externat et d'en déconnecter le calcul du coût d'un élève de l'enseignement public. En effet, aujourd'hui toute augmentation de la DGFL pour l'enseignement public ou toute augmentation du nombre de TOS et de leur rémunération se répercute en crédits supplémentaires pour l'enseignement privé avec une liberté totale d'utilisation. Ce n'est pas « toute la loi, que la loi » qui règle la question.
L'intervention du groupe faite en séance lors de la discussion des amendement explicite cette démarche:
Explication de vote amendements n° 111 (FdG&A) et 85 (PRG-MUP) : basculer l’investissement pour les lycées privés vers le public. Cher-e-s collègues, Mon explication de vote sur ces amendements vaudra explication de vote sur la série d’amendements sur des sujets similaires déposés par les deux groupes. Nous partageons pleinement le souci exprimé ici d’afficher une priorité absolue aux lycées publics. Nous sommes persuadés que seul un service public d’éducation, laïque et gratuit, est capable de répondre à l’immense défi de l’accès pour toutes et tous au savoir émancipateur. Elle est la seule à construire cette culture commune, condition du vivre ensemble et de l’égalité. Cet engagement doit se traduire concrètement par le renforcement du budget en direction des lycées publics, aussi bien en investissement qu’en fonctionnement. C’est le sens des amendements que portent mon groupe et, au-delà, toute la majorité. C’est aussi dans ce sens que la vice-présidente s’est engagée, dès le premier budget de cette mandature, en limitant l’investissement en direction des lycées privés aux seuls travaux d’urgence et d’accessibilité. Aucune place nouvelle ne sera financée par la Région. C’était vrai en 2011, ce sera vrai cette année encore. C’est bien parce que nous avons cette priorité au public chevillée au corps que nous sommes convaincus que la Région doit respecter ses obligations légales. Le niveau global du budget pour l’enseignement privé répond strictement à cette exigence et nous prémunit d’un risque contentieux qui mettrait justement en danger le budget des lycées publics. Ne nous lançons pas à l’aventure, au risque de devoir payer bien plus cher encore, au détriment du public et des politiques éducatives qu’a souhaitée la vice-présidente. Je veux toutefois souligner ici que l’expérience de la Région doit nous interroger justement sur la logique de la loi qui régit aujourd’hui le forfait d’externat. Cette loi, en effet, nous oblige à verser aux lycées privés l’équivalent de ce que nous versons pour les lycées publics, que ce soit à travers la DGFL ou la rémunération des personnels TOS. Notre Région, depuis la décentralisation, a fait le choix de renforcer significativement son action en direction des lycées publics, au travers de la revalorisation de la DGFL, à travers l’embauche de personnels TOS et la revalorisation de leur rémunération. Des choix qu’il va falloir poursuivre, tant les besoins sont immenses dans les lycées. La loi nous contraint donc aujourd’hui à réévaluer à la hausse le forfait d’externat. Elle nous oblige à payer sans aucun droit de regard, que l’enseignement privé utilise cet argent pour les bureaux des proviseurs ou pour embaucher des agents techniques ! C’est bien cette loi absurde qui doit changer, et c’est un chantier dans lequel la future majorité de gauche que nous espérons tous devra s’engager. Dans l’attente de cette loi, et pour préserver les lycées publics, nous voterons contre ces amendements. Je vous remercie.
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