LA POLITIQUE REGIONALE ENVERS LES ETABLISSEMENTS PRIVES SOUS CONTRAT D’ASSOCIATION. Conseil régional 28 juin 2011 Intervention d’Henriette Zoughebi Vice présidente en charge des lycées et des politiques éducatives

L’objet du rapport est de redéfinir la politique régionale en direction des lycées privés sous contrat d’association avec l’Etat. Il concerne donc les politiques obligatoires avec le forfait d’externat dont le montant n’a pas été revu depuis 2008 et les politiques facultatives, Le contexte a beaucoup évolué depuis l’adoption du dernier rapport qui engageait l’assemblée sur ce sujet. Les propositions que je vais vous présenter aujourd’hui prennent en compte ces évolutions Il s’agit d’abord de tirer les conséquences de l’application de la loi. Une loi qui mériterait sans doute d’être questionnée par la nouvelle majorité parlementaire. Je rappelle que le code de l’éducation prévoit que les régions versent aux lycées privés, au travers du forfait d’externat, l’équivalent du coût moyen par élève des classes correspondantes du public  avec totale liberté pour l’enseignement privé d’utilisation des crédits. L’application de la loi a conduit la région à réévaluer le forfait pour 2012 avec une hausse de 19 M€ Une telle augmentation nous amène à revoir la globalité de notre politique régionale en direction de l’enseignement privé en visant un recentrage sur les politiques obligatoires. Cela implique l’arrêt des aides régionales facultatives mises en place depuis plusieurs années. Je rappelle qu’elles engageaient , en 2011, 13 M€ de crédit. Cet arrêt se fera de manière progressive. Les propositions contenues dans le rapport ont été construites après que j’ai rencontré à divers reprises sur ce sujet  des représentants de l’enseignement privé et informé du travail en cours ceux de l’enseignement public (enseignants et parents d’élèves). Elles ont été élaborées avec la double préoccupation du respect du choix des familles mais aussi de la responsabilité particulière de la collectivité au regard de l’enseignement public. Et j’ai naturellement en tête les effets de la politique éducative menée par le précédent gouvernement depuis 5 ans et la situation alarmante dans laquelle se trouvent aujourd’hui de nombreux lycées publics.

L’enseignement privé sous contrat scolarise en Ile de France 18,7% des lycéen-ne-s ce qui est un peu au-dessous de la moyenne nationale (21,5% en 2011). Depuis plusieurs années, ses effectifs sont en augmentation continue. C’est pour moi une source d’inquiétude mais non d’étonnement. Chacun-e a gardé en tête les propos de Nicolas Sarkozy, au Latran en décembre. 2007, qui déclarait “l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur” et la remise en cause comme jamais auparavant, des valeurs et des missions de l’école publique, durant son quinquennat. Une remise en cause liée à une conception de l’école pensée comme un service marchand qui fonde la réussite des élèves sur la mise en concurrence des lycées qu’ils soient publics ou privés et la compétition entre les jeunes, qui promeut l'individualisme et le consumérisme éducatif. qui supprime la carte scolaire au nom d’une bien illusoire liberté des familles.

Dans un tel contexte et sachant que les établissements privés ont la possibilité de sélectionner les élèves sur dossier scolaire et présentent pour un certain nombre d’entre eux d’excellents résultats aux examens, comment s’étonner que de nombreuses familles, aient fait le choix de l’enseignement privé ? Elles ont fait ce choix malgré le coût important que cela représente dans le budget familial. Les lycées demandent une participation financière aux familles de 1446 € en moyenne par élève et par an, pour le pré bac, la tarification augmentant généralement en fonction du niveau d’enseignement. A ces frais s’ajoutent des frais d’inscription, de demi pension et pour certains des frais annexes très variables. Cette augmentation des effectifs de l’enseignement privé m’inquiète parce qu’elle contribue à accentuer les ségrégations sociales, scolaires et spatiales qui marquent aussi nos lycées publics franciliens Ségrégations spatiales avec plus de 60% des élèves scolarisés dans le privé concentrés dans 3 départements Paris, les Hauts de Seine et les Yvelines Ségrégations scolaires attestées par le dernier palmarès des lycées avec 95 lycées privés parmi les 104 lycées franciliens présentant 100% de réussite au bac, Ségrégations sociales par une tarification qui conduit à moins de 10% d’élèves boursiers scolarisés dans le privé, quand le public en accueille plus de 30%. Nous agissons dans le cadre des compétences régionales pour lutter contre ces ségrégations qui freinent la réussite de tous les lycéen-ne-s.

Comme je vous l’ai dit au début, le rapport propose de revoir la globalité de notre politique régionale en direction de l’enseignement privé en visant un recentrage sur les politiques obligatoires compte tenu de l’augmentation très conséquente, 19 M€, du forfait d’externat, imposée par le code de l’éducation.

Il apparait dans ce nouveau contexte que les lycées privés peuvent aujourd’hui sans aide régionale supplémentaire mettre en œuvre les politiques d’aide aux familles s’ils le souhaitent..

C’est pourquoi je propose d’arrêter les dispositifs concernant l’aide régionale à la demi-pension, l’aide régionale à l’équipement, l’aide régionale pour les frais de concours. De la même manière l’exécutif régional propose de ne pas renouveler le dispositif d’aide à l’achat des manuels scolaires mais avec une exception pour l’année scolaire 2012-2013 pour permettre d’achever le renouvellement engagé avec les changements de programme induits par la réforme de la voie générale.

Concernant l’investissement, nous avons stoppé depuis 2011 tout financement de places nouvelles, y compris d’internat, et il est proposé d’inscrire explicitement ces choix dans le rapport de juin. Je vous propose également l’arrêt du programme d’aide à l’investissement pour travaux et équipements pédagogique Toutefois, il est proposé à titre exceptionnel pour les années 2012, 2013 et 2014 d’affecter un montant annuel maximum de 8,3 M€ sur cette ligne au pour réponse aux demandes liées à une non-revalorisation des forfaits d’externat depuis 3 ans, en limitant les financements aux travaux de sécurité et accessibilité

Vous l’avez constaté en lisant ce rapport, l’exécutif régional ne cherche à rallumer aucune guerre scolaire. Il s’agit simplement aujourd’hui de tirer les conséquences de l’application de la loi, une loi, je le redit, qui mériterait de mon point de vue d’être questionnée par la nouvelle majorité parlementaire. Je suis convaincue dans le même temps de la nécessité de rétablir la confiance dans notre enseignement public. C’est essentiel parce que seule l’’école publique, laïque et gratuite, celle qui devrait être l’école du tous ensemble, peut permettre de dépasser les clivages sociaux et culturels. C’est bien pourquoi la priorité régionale doit être d’agir pour créer dans les lycées publics franciliens les conditions de l’égalité et de la réussite de tous les lycéen-ne-s, de sorte que les familles fassent massivement le choix de l’école publique.

Je vous remercie